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TROP DE BRUIT ou comment lutter  contre (entre autres) les excès des avions en Brabant wallon.
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Tous en avion vers le no-futur?

Vous pouvez être un farouche partisan d'Attac ou un opposant virulant. Peu importe, lisez cet article. Il y a des questions de bon sens dont on pourrait discuter.
Les fraises de Wépion et les pécheurs de crevettes de la côte vous en remercieraient.
Lire aussi par exemple
l'hinderland de DHL
ou Bierset et l'emploi partie 1 et partie 2.
L'équipe de trop de bruit.


L'original de cet article sur attac.be

Un article de Patrick Dupriez - publié le 18 octobre 2004 sur Attac.be

Nos arrière-petits-enfants auront peine à croire qu’il fut une époque comme la nôtre. En ce temps là, pour passer le week-end à Venise, une famille brabançonne larguait sans hésiter son lot de kérosène brûlé et de nuisances sonores au-dessus de ses voisins ; les crevettes pêchées à Ostende allaient se faire décortiquer à Casablanca pour revenir plus roses que nature garnir les étals de nos poissonneries ; la fabrication d’un litre de jus d’orange et son transport jusqu’aux rayons de nos supermarchés nécessitait la consommation d’un même volume de pétrole... « Mais vous le saviez, Bon-Papa, que les réserves de pétrole s’épuisaient ? » « Oui, gamin, on le savait ». « Et vous saviez, que le brûler dans des avions allait modifier le climat et provoquer des catastrophes ? » « Oui, mon petit gars, les écolos nous rabattaient les oreilles avec cette histoire... Mais on n’avait pas envie de changer nos habitudes ».

Nous avouerons à ces enfants de demain que l’Etat faisait alors la promotion active du transport aérien: financement des infrastructures, des énormes coûts de sécurité et de l’isolation des maisons ; avantages financiers divers pour attirer des compagnies dans nos aéroports ; absence de taxes sur le carburant des avions alors qu’elles sont ce que chacun sait sur l’essence de nos voitures et mobylettes ; et surtout, prise en charge par la collectivité des faramineux coûts environnementaux et des dépenses de santé résultant de ce trafic... Je ne sais pas vous, mais moi, même vieux et sage, j’aurai de la peine à leur expliquer tout ça...

Emploi ou environnement ? La question piège.

DHL, Ryan Air, TNT, mêmes combats, mêmes dilemmes ! Zaventem, Charleroi, Bierset, mêmes protestations et mêmes espérances.
D’un côté, ceux qui souffrent du manque de sommeil, du stress, de l’écœurement face à plus puissants qu’eux. Ils brandissent des chiffres, en milliards : pertes de valeurs immobilières, diminution de la productivité, coût pour la Sécurité sociale... De l’autre, patrons, travailleurs, chômeurs aussi, que la perspective de nouvelles embauches, même précaires, fait rêver. La situation est présentée comme un face-à-face à arbitrer entre 2 contraintes : emploi contre environnement, travailleurs contre riverains. Chaque parti politique étant censé choisir son camp pour négocier un hypothétique point d’équilibre, un juste milieu entre deux valeurs.
Pourtant, même si des décisions doivent être prises rapidement pour arbitrer ces tensions, ce juste milieu est une illusion. La force de rébellion ou de persuasion des intérêts individuels sacrifiés le rendra inéluctablement temporaire. Et les spots braqués sur ce duel entre deux équipes tirant sur une corde en sens contraire nous aveuglent par rapport aux enjeux les plus cruciaux.
Car la question essentielle et historique qui nous est posée est la suivante : est-il tolérable et sensé de poursuivre une politique de croissance du transport aérien ?
La réponse est en fait sans équivoque : la consommation en pétrole des avions est telle que la multiplication des vols parait indécente eu égard à leurs conséquences pour les générations futures. L’avion n’est un mode de déplacement et de transport acceptable que dans certains cas. Sa promotion par les pouvoirs publics s’apparente à l’accélération d’un véhicule qui foncerait droit vers un mur.
Si l’on admet que la réduction des émissions de gaz à effet de serre est une nécessité vitale pour nos sociétés, stopper l’augmentation du trafic aérien est absolument prioritaire. Et si l’on considère que la pollution atmosphérique a des conséquences graves sur la santé publique, le moyen de transport le plus polluant doit être défavorisé et non promu par l’Etat.

Le vrai défi : limiter le transport aérien !

L’inverse se passe pourtant au nom de quelques sentences présentées comme incontestables :

- « Ryan Air - et les autres low cost-, c’est la démocratisation du ciel ! »
Où mène ce slogan véritablement assassin pour tout politicien qui se voudrait courageux ? Et pourquoi pas : « le vol - je veux dire l’appropriation malhonnête... - c’est la démocratisation de la BMW » ?
Passer le week-end à Venise (ou Biarritz, ou Dublin, voyez le catalogue...) pour le prix d’1/2 heure de cuistax n’est pas plus un droit que ne le serait le fait de rouler dans une voiture surpuissante avec airco et tuning. Drôle de démocratie qui facture à d’autres le prix de ses petits plaisirs ! Le droit à la mobilité doit garantir l’accès aux services sociaux et culturels de base et la tendance serait plutôt à la baisse de ce côté là... Pour le reste, l’équité voudrait que chacun paie le prix juste des voyages qu’il s’offre.

- « Le transport de courrier express la nuit est une nécessité vitale pour économie »
Selon certains économistes, nous n’aurions pas le choix. Mais cette vérité résiste-elle à l’analyse ? Quel est le pourcentage de courriers réellement urgents transportés par les opérateurs DHL ou TNT ? 15, 20, 25 % ?
De fait, les entreprises réduisent leurs stocks. La logique du « just in time » s’installe partout et les marchandises se retrouvent sur la route ou dans les airs plutôt que dans des hangars. Mais est-ce une donnée inéluctable ? Qui, de l’offre de transport ou de la demande du commerce, joue le rôle de l’œuf ou de la poule dans cette évolution récente de l’organisation de notre économie ? La croissance du transport aérien de marchandises n’a rien de « naturelle ». Elle n’est d’ailleurs possible que grâce à l’impulsion et au financement des pouvoirs publics.

- « C’est ça ou rien ! »
« Un emploi est un emploi ! Dans notre situation, on ne peut pas cracher sur ce qui est proposé ... » Voilà le discours efficace du décideur, plus ou moins déférent face au patron de la multinationale qui agite la carotte de ses investissements ou le bâton de sa délocalisation. Ce faisant, il poursuit l’approche économique éculée des politiciens belges qui consiste à saisir l’opportunité plutôt que construire l’alternative. Il est certes normal de chercher à accueillir dans notre région des entreprises créatrices d’emplois mais il y a duperie quand ce discours cache les sommes gigantesques dégagées par la collectivité pour ce faire. En soutenant le développement du trafic aérien, nos gouvernements font le choix d’investir dans une économie non durable et acceptent d’en payer les dégâts sociaux et environnementaux. Au moins devons-nous admettre que ce choix est fait au détriment d’autres possibilités. Combien de chercheurs pourrions-nous payer dans nos labos avec les milliards investis à Bierset et les cadeaux illégaux offerts à Ryan Air ?

Prendre le parti d’une économie durable.

Décidément, l’arbitrage entre emploi et environnement sur les vols de nuit n’a de sens qu’à très court terme. Nous avons plus de choix, plus de pistes de décollage possibles que ce que le débat médiatique donne à voir. Notre défi collectif consiste à prendre réellement le parti d’une économie durable, respectueuse des écosystèmes et des humains qui y habitent. Innovation et modernité à la clef. Qualité de vie et terre vivable pour nos enfants en prime. Nous avons besoin pour cela de politiques capables de lever le nez du guidon et de voir plus loin que l’actualité immédiate.
Ceux-là pourraient par exemple, dès la sortie de crise DHL-BHV, considérer la taxation du kérosène au niveau européen comme une priorité politique majeure. Ainsi, les moyens dégagés pourraient être massivement investis dans un réseau ferroviaire express de Stockholm à Naples. Ainsi, demain peut-être, les crevettes d’Ostende pourraient à nouveau être décortiquées à la côte sans que les salaires n’y soient abaissés au niveau marocain.
Aller à Venise en TGV plutôt qu’en avion, ça doit être possible, non ? Quant aux fraises fadasses qui traversent l’Atlantique en avion entre Noël et Nouvel an, invitons-les à régaler chez elles. Juin à Wépion, c’est bien plus de plaisir...


Ecrit par Cherche l'info, le Dimanche 24 Octobre 2004, 09:02 dans la rubrique "Bruit et pollution des avions ".


Commentaires :

  Le commentateur n'a pas désiré laisser son identité.
11-06-23
à 06:37

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