--> Associations environnementales et apiculteurs s’inquiètent de la possible autorisation par l’Europe d’insecticides décimant les ruches
Les instances européennes vont se prononcer très prochainement sur l’autorisation du Fipronil, une molécule entrant dans la composition de nouveaux insecticides. Or, cette molécule est soupçonnée d’affecter gravement les abeilles.
Friends of the Earth Europe, Inter-Environnement Wallonie (IEW), Nature et Progrès Belgique et Pesticides Action Network Europe (PAN-E) et appellent l’autorité à ne pas autoriser le Fipronil dont l’évaluation est d’ailleurs incomplète.
Depuis une dizaine d’années, l’apiculture enregistre de lourdes pertes dans les ruchers d’Europe et d’ailleurs. On soupçonne de «nouveaux insecticides», produits systémiques (ils imprègnent toute la plante) et persistants, d’être responsables de ces pertes. Ils intoxiqueraient les abeilles de façon chronique et dérégleraient leur comportement avec pour conséquence la mort à brève échéance de la colonie. Le Fipronil est l’une des molécules mise en cause dans ce processus. Il est utilisé actuellement dans le cadre d’autorisations provisoires. Les autorités européennes examinent actuellement la possibilité de l’inscrire à la liste positive des substances qui pourront faire l’objet de nouvelles autorisations par les Etats.
Le Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale remplit un rôle d’avis capital dans le processus d’autorisation. Or, ces experts balancent visiblement entre l’interdiction pure et simple de cette substance, et une solution ‘flexible’, non encore définie, qui laisserait vraissemblablement la patate chaude aux Etats membres. L’enjeu est de taille. Sur un des plateaux de la balance, le chiffre d’affaire du Fipronil, qui représente pour son producteur, la firme BASF, plusieurs centaines de millions d’Euros (1).
Sur l’autre plateau, les intérêts apicoles, qui outre leur propre production (miel, pollen), peuvent faire valoir le poids économique de la pollinisation (200 milliards de dollars annuels dans le monde, selon la FAO (2).
Par ailleurs, en fournissant un appoint économique à bon nombre de petits cultivateurs, l’apiculture vient en appui aux politiques de lutte contre la désertification des zones rurales qui constitue un défi pour de nombreux pays européens. Enfin, toujours de ce côté de la balance, on ajoutera les intérêts de l’environnement en général, car le Fipronil, produit persistant, toxique à faibles doses, se retrouve in fine notamment dans les eaux de surface et dans l’air (3) où sa présence commence à inquiéter.
Apiculteurs et associations d’environnement demandent donc à la Commission européenne et à ses experts de bannir le Fipronil. Ils demandent aussi que soit mis en place un système d’évaluation des risques liés aux pesticides qui prenne en compte les intoxications chroniques, ce qui n’est pas fait actuellement. Ils rappellent que la ruche, organisme complexe qui effectue, avec le butinage, un extraordinaire travail de micoprélèvements dans l’environnement, a par là un rôle important de sentinelle de notre environnement. La disparition des abeilles est une mise en garde qu’il est urgent de considérer à son juste poids. L’autorité européenne a aujourd’hui l’occasion de concrétiser cette prise en compte en refusant l’inscription du Fipronil sur sa liste positive.
Contacts :
(1) J.R. Fourtou, PDG de Rhône-Poulenc à l’époque où cette entreprise possédait encore ce produit, revendu depuis successivement à Bayer et BASF, déclarait que l’ensemble des applications du Fipronil représentait un total de 440 millions de dollars.
(2) Voir sur le site de la FAO : http://www.fao.org/ag/fr/magazine/0512sp1.htm
(3) Voir par exemple un article de Gaëlle Dupont dans Le Monde du 18 octobre 2006, revue de presse de l’UIPP : http://www.uipp.org/actualite/presse061018.php