Vous pouvez lire cette chronique et bien d'autres, sur le site de l'écrivain Vincent Engel, dans la rubrique "Poil à penser", où s'expriment différents chroniqueurs comme Claude Javeau, Alain Berenboom ou Hugues Le Paige mais aussi le porte-parole de Trop de Bruit, Denis Marion. Cliquez-ici pour consulter ce site.
Ça y est, un responsable quelconque l’a annoncé : Zaventem va changer de nom. Attention, pas la commune de Zaventem dont le conseil communal nouvellement élu aurait trouvé plus attrayant d’opter pour Vliegtuigenberg ou Boeingbusland ; l’aéroport seulement. Seulement, mais sans lequel Zaventem ne serait qu’une paisible commune de la périphérie bruxelloise, heureuse de n’avoir à subir que les tracas des autoroutes et les bêlements bucoliques des embouteillages.
Or donc, “Bruxelles-Brussel National” est mort, vive “Brussels Airport” ! Tout va changer ! Tout ? Quoi, le quidam ne devra plus marcher quarante minutes à travers des couloirs d’hôpitaux pour aller attendre une heure devant une porte d’embarquement aussi séduisante que le volet du crématorium ? Des vahinés nous attendrons avec des colliers de fleurs et l’on nous servira des verres de punch à l’atterrissage ? Nenni. Alors quoi, juste un coup d’annonce, un lifting à la noix ? Non plus. C’est plus subtil et plus grave sans doute.
“Brussels Airport”, en anglais, nous rappelle que cet aéroport n’est plus sous le contrôle de l’Etat national. Des financiers australiens en attendent un bon “return” et, dans la foulée, le “responsable” précité a annoncé l’intention des autorités portuaires d’augmenter les vols et les destinations, pour faire de Brussels Airport le grand aéroport international que mérite la capitale de l’Europe. Autre manière de dire que les décisions de la justice belge, qu’elles soient exprimées en français ou en néerlandais, ne concernent pas les propriétaires de l’aéroport. Pas plus que ne les concernent les associations de riverains et leurs insupportables jérémiades - les bureaux de la direction de Brussels Airport bénéficient de la meilleure insonorisation qui soit, celle qui ne laisse entrer aucune critique.
“Brussels Airport”, ça sent bon son extra-territorialité. Ce ne sont plus seulement les avions qui décollent en survolant Bruxelles et les zones surpeuplées ; c’est tout l’aéroport. Et dans la foulée, même notre Ministre pourrait changer de nom : Uitland.
Cela dit, ce nom va poser un problème : Charleroi s’appelle depuis longtemps “Brussels South” ; Ostende pourrait prendre le nom de “Brussels North”. Zaventem devrait préciser : “Brussels Central Airport”. Et pour Liège ? Il nous reste “Luxembourg” ou “Schumann” - ou “Chapelle”, l’aéroport où l’on irait prier pour qu’aucun accident ne survienne sur une zone habitée. Et grâce aux compagnies lowcost, on pourra bientôt prendre l’avion omnibus. En comptant une demie heure par escale, il faudra autant de temps pour remplir l’avion et les poches de leurs propriétaires que pour aller à Casablanca. Avec la Sabena, vous y seriez déjà (en faillite) ; avec Brussels Airport, vous y êtes encore.
à 21:36