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TRANSPORT: MARASME ÉCONOMIQUE, ACCROISSEMENT DES NUISANCES

--> Quel plan de vol pour le transport aérien ?

Alors que Chaulnes, en Picardie, vient d’être désignécomme lieu où sera construit un aéroport contesté, l’annonce par Airbus de 6 000 suppressions d’emploi le 17 janvier succède à celles faites par Boeing (30 000 personnes) ou British Airways. Depuis le 11 septembre 2001, l’activité aérienne aurait chuté d’au moins un quart aux Etats-Unis, mais la crise - faillite de la compagnie belge Sabena, naufrage de la Swissair, etc. - avait débuté bien avant les attentats de New York et Washington. Ne pourrait-elle être utilisée pour engager une profonde réflexion sur ce secteur d’activité ?

Un article du Monde Diplomatique de février 2002 (Philippe Bovet, journaliste) qui, s'il traite d'une situation franco-française essentiellement, offre également la possibilité d'une réflexion globale. NDLR

Avant les attentats terroristes perpétrés aux Etats-Unis le 11 septembre 2001, à tout moment il y avait en permanence 250 000 personnes dans le ciel, 4 millions de passagers utilisant quotidiennement ce mode de déplacement (1). Si les activités aéroportuaires se sont surtout développées en Asie, en Amérique du Nord et en Europe, le trafic a connu en France, depuis 1975, une croissance annuelle moyenne de 6 % (2). Jusqu’au premier semestre 2001, Roissy-Charles-de-Gaulle, un des aéroports les plus rentables d’Europe, a vu son trafic croître de 10 % par an (3).

Cependant, en France, la bonne santé de ce secteur économique s’appuie sur un nombre conséquent de privilèges dont l’obtention s’explique en partie par le statut international de l’activité. Ainsi, le kérosène n’est pas soumis à la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP). La TVA sur les billets d’avion - seulement 5,5 % - ne s’applique qu’aux trajets hexagonaux pour les billets achetés en France. Autre faveur étonnante : l’achat, l’entretien, le nettoyage et la surveillance des avions sont exemptés de TVA pour toute compagnie aérienne faisant au moins 80 % de ses activités avec les départements et territoires d’outre-mer (DOM-TOM) et l’étranger.

En fait, le champ d’application de l’article 262-II-4 du Code général des impôts exonère tout service lié à l’aviation, autant la construction des appareils que la livraison des plateaux-repas destinés aux passagers. De son côté, l’article 1518 A minore de 30 % la base de calcul de la taxe foncière payée par les aéroports. Aéroports de Paris (ADP) (4) réalise ainsi une économie annuelle de 63 millions de francs. On pourrait citer d’autres exemples, français et étrangers, de ces faveurs toujours légales, mais jamais transparentes (5). En application d’une convention franco-américaine de 1994, le pôle aérien de l’entreprise de messagerie rapide Federal Express, implanté à Roissy, est totalement exonéré de taxe professionnelle !

Gaz à effet de serre
« Le transport aérien est devenu une zone détaxée mondiale, explique M. Hermann Scheer (6). La détaxation des carburants privilégie ainsi les transports polluants, les cycles économiques globaux par rapport aux cycles régionaux, et les groupes des pays industrialisés par rapport aux petites et moyennes entreprises. » Dans le cadre des négociations climatiques, les pollutions engendrées par l’aéronautique ne sont pas comptabilisées ! « Si on payait le coût réel du transport aérien, ajoute M. François Ploye, consultant en environnement, on se rendrait compte qu’il n’y a aucune raison d’importer certains fruits du bout du monde simplement parce qu’ils sont moins chers. On n’irait pas non plus passer toutes ses vacances en Thaïlande, parce que le coût de la vie y est moins élevé. »

De tous les modes de déplacement, le transport aérien est le plus consommateur de carburant. Une personne effectuant un aller-retour Paris-Marseille en avion rejette 150 kilogrammes de gaz à effet de serre. Par le train, ces émissions ne dépasseraient pas 3 kg. Rien de plus criant que le gaspillage d’énergie du Concorde, un avion qui, malgré le terrible accident du 25 juillet 2000 à Gonesse, reprend les airs pour raison de prestige. Lorsqu’un Boeing 747-400 consomme 12 788 litres de kérosène à l’heure pour transporter entre 390 et 569 personnes en fonction des versions, le Concorde en brûle 25 629 pour 100 passagers (7). « En matière de développement durable, cet avion est une aberration, constate M. Jean-Pierre Blazy, député-maire de Gonesse et président du Conseil national du bruit et de l’Association ville et aéroport. Je suis hostile au fait qu’il soit remis en service, mais je n’ai aucun moyen de m’y opposer. »

Boeing a sur ses planches à dessin la réalisation d’un avion de 150 à 250 places nommé Sonic Cruiser, plus lent que le Concorde, mais qui permettrait de gagner une heure sur les vols transatlantiques, au prix d’une consommation de 35 % plus élevée que celle des avions classiques. Dans une lettre ouverte au vice-président de Boeing, la Suédoise Margot Wallström, commissaire européenne à l’environnement, a fortement critiqué ces choix : « Gagner une heure sur un vol transatlantique vaut-il un accroissement significatif des émissions de CO2 qui contribuent au changement climatique ? Votre secteur industriel devrait (...) développer des motorisations alternatives aux énergies fossiles. Plus haut, plus gros, plus vite, ne devrait plus être le leitmotiv du développement technologique (8). » Gelé après le 11 septembre, le projet semble avoir été relancé, les premiers appareils devant entrer en service en 2008.

Au cours des dernières décennies, les motorisations des avions, moins polluantes, moins bruyantes, ont beaucoup évolué. Mais l’augmentation du trafic a très largement contrebalancé ces progrès. Pour faire face à cet accroissement, nombre d’aéroports français et étrangers présentent des projets d’extension. A chaque fois, des riverains s’y opposent.

Créé dans les années 1970, l’aéroport eurorégional de Lyon - Saint-Exupéry (anciennement Satolas) n’accueille que six millions de passagers par an. Pourquoi alors la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Lyon pousse-t-elle au développement des infrastructures et veut-elle voir doubler les deux pistes existantes ? « On leurre les élus avec un développement économique qui est à prendre avec des pincettes, s’insurge Mme Evelyne Lavezzari, présidente de l’Association contre l’extension et les nuisances de l’aéroport de Satolas (Acenas). Les prétendues créations d’emplois sont en fait des transferts d’activités. Des entreprises viendraient s’implanter avant tout parce que la taxe professionnelle est ici inférieure à 10 %, contre 17 % ailleurs ! »

La construction de la gare TGV intermodale, qui entendait drainer plus de passagers vers l’aéroport, a coûté 800 millions de francs et a été épinglée à plusieurs reprises par la Cour des comptes : elle accueille moins de 600 passagers par jour ! Par manque de clientèle, le seul vol transatlantique vers New York a été arrêté le 31 août 2001, après seulement dix-sept mois d’exploitation - alors que la campagne de promotion de cette ligne, affrétée par Delta Airlines, a été intégralement financée par la chambre de commerce de Lyon. Face à une si faible fréquentation de l’aéroport, le projet de développement semble injustifié. Mais, opposés à la puissante CCI, les 230 000 riverains des 22 communes entourant l’infrastructure se sentent quantité négligeable. Comme l’explique un autre adhérent de l’Acenas, « nous avons perdu confiance dans une administration dont les membres pensent plus à gérer leur carrière et à rédiger de beaux projets, qu’à proposer des schémas cohérents et concertés de développement ».

Néanmoins, en 1996, les riverains de l’aéroport de Strasbourg ont réussi à faire reculer l’entreprise de messagerie rapide DHL. Celle-ci voulait implanter sa plate-forme européenne de fret sur l’aéroport alsacien. L’un des principaux désaccords portait sur la question des vols de nuit. Sur la carte de visite d’un aéroport, la mention « Fermé de 23 h 30 à 6 heures » est rarement souhaitée.

Une telle pause nocturne existe pourtant à Orly. Roissy la refuse, bien que cette tranche horaire ne comptabilise que 150 mouvements nocturnes, essentiellement du fret européen. Président de l’Association de défense du Val-d’Oise contre les nuisances aériennes de Roissy (Advocnar), M. Claude Carpentier observe : « Il est absurde de sacrifier la santé et la tranquillité de 1 million ou 1,5 million de riverains pour que des endives ou du fromage de Hollande arrivent avec une ou deux heures d’avance sur les marchés (9). »

En fait, la croissance récente du trafic aérien tient surtout à l’ouverture à la concurrence de cette activité, qui, en France, s’est faite en deux phases, 1993 et 1997. Suivant le modèle développé aux Etats-Unis, Air France a mis en place sur Roissy son « hub », un réseau en étoile qui rabat sur Paris ses vols nationaux et offre de multiples correspondances. A partir de cette plate-forme centrale, Air France propose des rotations, toutes les trente ou soixante minutes, entre Paris et les aéroports de Bordeaux, Marseille, Nice et Toulouse. Au départ d’Orly, la compagnie propose en semaine vingt-trois allers-retours quotidiens entre Paris et Marseille ; il en existe aussi sept au départ de Roissy. Voulue, cette saturation du ciel permet à la compagnie qui tient le réseau de conserver de multiples créneaux horaires, ces « slots » que d’autres n’auront pas et qui, le cas échéant, seront négociables ou échangeables.

Dans le cas de Paris, cette multiplication des liaisons donne l’impression de la nécessité d’un troisième aéroport. On parle toujours d’un doublement du trafic aérien d’ici à 2020 et les plafonds fixés d’un commun accord entre les riverains d’Orly et de Roissy et le ministère des transports sont en passe d’être atteints : 250 000 vols par an pour Orly, 55 millions de voyageurs annuels pour Roissy. Ces limites sont artificielles, car, techniquement, ces deux plates-formes pourraient supporter plus, mais au détriment des riverains. Aux heures de pointe, il y a un décollage ou un atterrissage toutes les 35 secondes à Roissy. Reporter tout ou partie du trafic francilien vers la province revient à répartir la nuisance et non à la supprimer.

Des solutions existent pour désengorger le ciel. On les trouve, d’abord, au sein de l’activité aérienne. « Il existe des gisements de capacités non exploités, explique M. Jean-Paul Armangau, secrétaire national de Union syndicale de l’aviation civile-CGT. On peut faire plus avec moins d’avions. » Le nombre moyen de passagers par avion est de 102 au départ de Roissy et de 106 au départ d’Orly, alors qu’il est de 140 à partir de Londres-Heathrow. Avec les chiffres fournis par la direction générale de l’aviation civile (DGAC), M. François Cosserat, vice-président du Mouvement national de lutte pour l’environnement (MNLE), a mis en évidence le faible emport moyen au départ de Paris vers les pays européens : pour les six premiers mois de 2001, 58 voyageurs vers l’Allemagne, 70 vers le Royaume-Uni. Il est plus élevé vers les destinations lointaines : Etats-Unis 202, Afrique du Sud 281, Argentine 196. « Cinquante-huit personnes par avion vers l’Allemagne, c’est du gaspillage, constate M. Cosserat .Sur des destinations notamment européennes, on devrait assister à la mise en place d’une coopération entre les compagnies pour mieux remplir les appareils. »

L’air et le rail
Des solutions s’imposent aussi pour transférer des passagers vers le rail. Ne voulant pas entrer dans une concurrence avec Roissy ou Heathrow, le gouvernement néerlandais et les autorités de l’aéroport d’Amsterdam-Shiphol ont fait le choix de limiter la croissance de leur infrastructure à quarante millions de passagers par an à l’horizon 2015. Ils comptent transférer cinq millions de passagers par an sur le réseau de TGV européen (10). Car, si l’avion demeure indispensable pour les liaisons transatlantiques ou intercontinentales, il est aisément remplaçable par le train à grande vitesse pour les liaisons ne dépassant pas 1 000 kilomètres, celles-là mêmes qui occupent la majorité des créneaux horaires des aéroports.

Depuis novembre 1994, le coeur de Paris est à trois heures, en Eurostar, du centre de Londres. En semaine, un train rapide relie les deux villes vingt-six fois par jour. Pourtant, Air France propose toujours vingt-quatre vols quotidiens vers la capitale anglaise, British Airways dix-sept, British Midland cinq...

Sur une même destination, cette concurrence air-rail n’a aucun sens environnemental. M. Cosserat l’a mis en évidence : deux vols sur trois, au départ de Paris, se font sur des distances correspondant à quatre heures de TGV. En fait, si on prend en compte les trajets du centre-ville à l’aéroport et la nécessité d’arriver au moins une heure avant le décollage, emprunter l’avion comporte plus de désagréments. Une intermodalité rail-air bien développée pourrait se traduire par dix millions de passagers en moins pour l’aéroport de Roissy (11). N’est-il donc pas temps de ramener l’aviation à des considérations plus terrestres ?

Philippe Bovet

1) The Economist, Londres, 7 juillet 2001.

(2) « Activités aéroportuaires, aménagement du territoire et développement durable », rapport du colloque du 7 février 2001, Assemblée nationale, p. 15.

(3) Le Monde, 7 juin 2001.

(4) Etablissement public à autonomie financière, sous tutelle des ministères des finances et des transports et qui gère les aéroports de Roissy, d’Orly et du Bourget.

(5) Aucun avantage en matière de taxe foncière n’est accordé au transport ferroviaire (les billets de la SNCF subissent une TVA à 5,5 % pour les seuls trajets hexagonaux).

(6) Hermann Scheer, Le Solaire et l’Economie mondiale, Solin/Actes Sud, Arles 2001.

(7) Die Woche, Hambourg, 17 août 2001.

(8) Service presse de Mme Margot Wallström.

(9) 60 Millions de consommateurs, Paris, juillet-août 2001.

(10) Rapport d’information sur la politique aéroportuaire, Assemblée nationale, 2 juin 1999, p. 46.

(11) « Activités aéroportuaires... », op. cit., p. 149.

Ecrit par Cherche l'info, le Samedi 23 Avril 2005, 21:29 dans la rubrique "Bruit et pollution des avions ".