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ÉNERGIE - Polémique autour d’un parc d’éoliennes géant
Petite leçon de réalisme du chroniqueur britannique George Monbiot : les parcs d’éoliennes sont moches mais indispensables. Et de toute façon ils ne suffiront pas. Il faut réduire la consommation d’électricité.
(Courrier International 26-5)
Les opposants à la construction d’un parc éolien dans le comté de Cumbria [dans le nord de l’Angleterre] ont trafiqué les chiffres et exagéré les effets néfastes du projet. Ils donnent l’impression de ne pas saisir les dangers du réchauffement planétaire et sont soutenus par une sordide coalition de lobbyistes du nucléaire et de sceptiques du changement climatique. Pourtant, on aurait tort de ne pas prendre leur campagne au sérieux.
Si le projet de Whinash, prévu en bordure du parc national du Lake District, obtient le feu vert, ce sera le plus grand parc éolien terrestre d’Europe et, selon ses auteurs, il produira suffisamment d’électricité pour alimenter 47 000 foyers. Sans opérations de ce type, notre pays n’a aucune chance de réduire ses émissions de carbone de 20 % d’ici à 2010, ainsi qu’il en a l’intention. A l’heure actuelle, les éoliennes terrestres sont le moyen le moins coûteux de produire de l’énergie sans utiliser des combustibles fossiles. Pourtant, elles ne fournissent que 0,32 % de notre électricité. Face au danger que représente pour la planète le réchauffement climatique, il serait irresponsable et criminel de ne pas en installer davantage. Pour consulter la population sur ce projet et sur la future politique énergétique, une enquête officielle a été lancée à la mi-avril.
L’an dernier, l’Advertising Standards Authority [l’organisme britannique de vérification de la publicité] a jugé que les opposants au parc éolien avaient exagéré la taille et le nombre des éoliennes ainsi que l’impact qu’elles auraient sur le tourisme et les prix de l’immobilier. Sans aller jusqu’à juger une cause en fonction de ses défenseurs, je dirai que l’énergie éolienne et la manière dont elle est encouragée suscitent chez moi quelques réticences. Les parcs éoliens, aussi nécessaires soient-ils, constituent un exemple classique de ce que les environnementalistes appellent une “solution de fin de processus”. Au lieu de s’attaquer à la source du problème – notre consommation massive de ressources énergétiques –, on propose un moyen moins nocif d’y faire face. Du moins en partie. En remplaçant les centrales thermiques classiques, le projet de Whinash réduira de 178 000 tonnes les émissions annuelles de dioxyde de carbone. Ce chiffre peut paraître impressionnant, mais il faut savoir qu’un simple avion de ligne faisant quotidiennement l’aller-retour entre Londres et Miami produit l’équivalent de 520 000 tonnes de dioxyde de carbone par an, annulant le bénéfice de trois immenses parcs éoliens.
Nous sommes convaincus que les technologies de remplacement vont résoudre tous nos problèmes. En remplaçant une forme de surexploitation par une autre, nous pensons pouvoir continuer à accroître notre consommation énergétique sans détruire les systèmes nécessaires à la vie humaine. Peut-être pourrons-nous le faire pendant un certain temps, mais à terme il nous faudrait utiliser l’intégralité des sols britanniques.
Il faudrait mille parcs de cette taille d’ici 25 ans !
Pour prendre un exemple, les défenseurs des piles à hydrogène sont persuadés que tous les véhicules du pays pourraient un jour être propulsés par de l’hydrogène, et ce, grâce à l’électricité générée par l’énergie éolienne. Ont-ils une idée de ce que cela représente ? Faute d’avoir accès aux chiffres britanniques, j’ai consulté une étude sur les Etats-Unis d’où il ressort que, pour assurer une telle production, il faudrait doubler le réseau américain d’éoliennes. Ce qui veut dire que, toutes proportions gardées, la production britannique devrait être multipliée par 600 rien que pour alimenter les moteurs de nos voitures. Quand on prend en compte tous les autres secteurs, le chiffre devient incalculable. Les autorités britanniques prévoient que le nombre de passagers des transports aériens grimpera de 180 millions à 476 millions au cours des vingt-cinq prochaines années. Pour réduire d’autant les émissions de carbone produites par ce trafic, il faudrait installer 1 094 parcs éoliens de la capacité de celui de Whinash.
Autrement dit, il n’existe pas de moyen écologiquement viable de répondre à la future demande énergétique. La seule stratégie compatible avec l’environnement est une réduction à grande échelle de la consommation globale. Greenpeace et Les Amis de la Terre, qui soutiennent le nouveau projet de parc éolien, ne cessent de le répéter, mais on ne les écoute pas. Ce qui est acceptable pour le marché, et donc pour les pouvoirs publics, c’est l’apparition de nouvelles formes de production d’énergie offrant de nouvelles possibilités d’investissement, et non une réduction massive de la production d’énergie qui limiterait ces possibilités. Les associations écologistes ont beau claironner leurs priorités, ce que le gouvernement entend, c’est “davantage de parcs éoliens” et pas “moins de vols”.
A mon sens, les écologistes devraient publier un communiqué pour fixer leurs limites au développement de ces nouvelles technologies. A quel stade interviendront-ils pour s’élever contre le nombre excessif de parcs éoliens et demander aux pouvoirs publics de cesser d’en construire ? A quel moment jugeront-ils nécessaire de s’orienter vers des projets décentralisés de microproduction ?
J’aimerais également qu’ils cessent de prétendre que les parcs éoliens sont beaux. Ils sont simplement moins laids et moins destructeurs que la plupart des autres options. Ils sont aussi beaucoup moins déplaisants que le changement climatique qui menace de dévaster les habitats que les opposants aux parcs éoliens tiennent tant à préserver. Même si nous devons en construire, il serait plus honnête de les reconnaître comme un mal nécessaire.
Il y a autre chose qui me gêne dans le soutien des écologistes aux parcs éoliens. Le communiqué commun publié par Greenpeace et Les Amis de la Terre déplore que les “opposants au projet, qui doit être implanté près de l’autoroute M6, prétendent que les éoliennes gâcheraient la vue, semblant oublier que le paysage est déjà défiguré par l’autoroute”. Il cite également Jill Perry, des Amis de la Terre, disant : “Je suis stupéfait de voir ces gens demander que la région devienne un parc national. A-t-on déjà vu un parc national traversé par une autoroute ?” Oui, ceux de New Forest et de South Down, par exemple. Et leur création a été soutenue par Les Amis de la Terre.
Je suis pour la construction du parc de Whinash. Mais, à mon avis, les défenseurs du projet devraient être beaucoup plus réceptifs aux arguments de ses opposants locaux. Pourquoi ? Tout simplement parce que, dans d’autres campagnes, ils pourraient avoir à lutter dans le même camp.
George Monbiot The Guardian
Ecrit par Cherche l'info, le Lundi 30 Mai 2005, 19:15 dans la rubrique "Bruit et pollution des avions ".
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