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Bruxelles-National ne pleure pas DHL

UN ARTICLE DE BERNARD DEMONTY publié sur lesoir.be

On les verra moins, les trois lettres caractéristiques de l'entreprise de courrier nichée à Bruxelles-National. Mais à l'aéroport, on a l'impression que la décision de DHL de voler partiellement vers d'autres cieux n'aura pas d'autres conséquences que cette légère modification du paysage.

Pour Biac, la société de gestion de l'aéroport, les conséquences sont minimes. Les vols de nuit de DHL ne représentent que 5 % du chiffre d'affaires de la société. Si l'on tient compte du fait que l'entreprise maintient une présence à Bruxelles-National, on peut conclure que, en termes de revenus, la facture ne devrait pas dépasser les 3 %.

Le bénéfice de la plateforme ne devrait pas, non plus, en être affecté. Parce que si l'activité nocturne appelée à disparaître générait des rentrées, elle occasionnait également des coûts, qui ne devront plus être supportés demain.

Le processus de privatisation de l'aéroport ne sera donc pas compromis. Pour rappel, l'Etat, actionnaire à 63,56 % de l'aéroport, souhaite en céder le contrôle avant la fin de l'année. Deux candidats restent en lice : la société espagnole Ferrovial et l'australienne Macquarrie. On pouvait craindre que ces deux candidats s'effraient d'un départ, même partiel, de DHL. Il n'en est rien. Les offres tablaient sur le scénario d'une délocalisation partielle et les candidats ne sont donc pas surpris. En outre, le prix de l'aéroport (évalué, selon certaines sources à 500 millions d'euros) n'est que très légèrement affecté à la baisse par la décision de DHL.

Bref, l'aéroport, qui a digéré la faillite de la Sabena, qui représentait 50 % de son chiffre d'affaires, ne sera pas atteint dans ses comptes, cette fois-ci.

Le sera-t-il dans ses perspectives de développement ? Tout dépend sur quel critère on se base, dit Eric Monami, directeur d'études chez Stratec, un bureau d'études spécialisé dans les transports, l'environnement et l'aménagement du territoire. En termes d'infrastructure au sol, Bruxelles-National présente encore des capacités excédentaires appréciables, surtout la nuit, explique-t-il.

Si l'on se base sur l'accessibilité de l'aéroport, il reste de gros efforts à faire, mais le “ diabolo ” (un projet ferroviaire qui va relier beaucoup mieux l'aéroport au réseau ferroviaire, NDLR), va grandement améliorer la situation.

En résumé, l'aéroport n'est pas saturé, et sera bien desservi d'ici une dizaine d'années, au maximum. Reste un hic, de taille : le bruit. Sur ce point, il est vrai que Zaventem est très près de Bruxelles, dit Eric Monami. Bruxelles-National est à douze kilomètres de la capitale. Mais ce n'est pas vraiment exceptionnel, poursuit l'expert. L'aéroport de Madrid est à quinze kilomètres du centre, celui de Genève est à cinq kilomètres et celui d'Orly est à quatorze kilomètres de Paris...

Pour le spécialiste, il ne faut pas pour autant nier le problème de santé publique. Ce problème existe, et des études le prouvent désormais, dit-il. Cela dit, il n'existe pas de normes internationales en matière de nuisances sonores. Il s'agit donc d'une question purement politique. En Belgique, le gouvernement tient désormais compte de cette limite, il l'a prouvé avec la décision concernant DHL.

Malgré cela, pour l'avenir, Eric Monami pense que le potentiel économique de Bruxelles-National est assuré. Le processus de privatisation en cours est éclairant, à ce titre. Plusieurs investisseurs, et non des moindres, ont marqué leur intérêt. Cela signifie de manière éclatante que les professionnels du secteur aéroportuaire, eux-mêmes, estiment que la plateforme bruxelloise est intéressante et offre des perspectives de croissance.

Reste la question, tant de fois évoquée, de la construction d'un nouvel aéroport à la campagne, qui serait destiné à accueillir les vols de nuits. Eric Monami, rejoint par d'autres spécialistes, n'y croit pas. Il s'agirait d'un investissement énorme, non seulement pour la construction de l'aéroport, mais aussi pour l'infrastructure routière et ferroviaire. La Belgique y consentira-t-elle ? D'autre part, des expériences à l'étranger montrent que les aéroports à la campagne ne se substituent jamais totalement à ceux des villes. Sans parler des riverains.

Bref, on verra moins le logo DHL à Bruxelles. Mais on verra (et on entendra...) encore des avions.
Ecrit par Cherche l'info, le Vendredi 22 Octobre 2004, 18:00 dans la rubrique "Bruit et pollution des avions ".